vendredi 11 février 2022

La maison 2

 

ATELIER DU 18 NOVEMBRE 202


Cest devant la porte que le temps bat et résonne, comme un tambour, juste avant qu’elle ne s’ouvre, un moment suspendu entre un avant et un après, une embrasure sur une inconnue, ça fait taper le cœur, ça met des éblouissements dans les yeux; cette porte n’a rien d’extraordinaire non, c’est l’attente de son ouverture qui en fait son épaisseur, en bois sombre, un peu fendillé, peinte en marron terni, elle laisse deviner un jardinet derrière avec des roses trémières s’élevant au dessus du mur, présage d’un espace merveilleux à venir. Il faut une clef pour entrer, celle-ci en fer grossier, lourde dans la main, massive, imposante, pose déjà la question: comment entrer dans l’histoire sans être sûr d’y arriver, les apparences sont trompeuses, les objets peu fiables, les clefs peuvent rouiller au point de s’élimer et ne plus pouvoir faire tourner la gâche dans la serrure, l’huis resterait clos, ainsi que la possibilité d’entrer dans ce jour. Le cœur de l’enfant se serre un peu, cela demande déjà foi en la matière, en l’homme qui fabrique les objets, à l’entropie de l’univers qui contient en lui la possibilité d’une désorganisation, d’un désordre, une destruction ou un passage transformateur, que quelque chose soit enclenchée pour qu’une autre énergie apparaisse. C’est au-delà de son entendement, ça dépasse de loin l’envie d’entrer, de franchir un seuil, il n’y a pas de retour en arrière possible, c’est la loi du temps, naître à quelque chose, se risquer à découvrir plus loin, ça se laisse désirer, mais elle, elle veut juste que les choses avancent, elle trépigne dans ses petits pieds après cette longue nuit en train. Elle songe à cet instant à la porte de chez sa grand-mère à Saint-Étienne, avec son heurtoir en bois qui semble dire «toc toc! ouvre toi! par la seule force des sons, la seule force de l’imaginaire ou bien «abracadabra», que l’on traduit en hébreu par «je ferai, comme je dirai», formule magique qu’elle affectionne parce qu’elle croit que personne ne sait ce que ça veut dire, ça a le pouvoir qu'on lui donne et à ce moment, elle qui ne connaît pas l'hébreu, qui est seulement à l’âge de la pensée magique, elle entend les mouettes dans le ciel bleu qui crient en ricanant de leurs becs acérés: coua coua! que faîtes-vous là vous qui n’y êtes point encore ?


Que se passe-t-il derrière cette porte ?


On ne sait, quelque chose en nous le sait, comme la graine sait la plante


Quelle est l’histoire de la plante ?


Découvrir le pourquoi de la lumière (Cf le livre des questions d’Edmond Jabès)


A moins que la réponse ne soit dans ce morceau de chanson de Léo Ferré qui me revient, la mémoire et la mer:


Et sous mon maquillage roux                                

S’en vient battre comme une porte                        

Cette rumeur qui va debout                                   

Dans le rue aux musiques morte

                          

C’est fini la mer c’est fini

Sur la plage le sable bêle

Comme des moutons d’infini

Quand la mer bergère m’appelle  (Ferré)





Estourelle



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